LA MUSIQUE ROMANTIQUE,
EMPORTEMENTS ET
CONSOLATION
La musique romantique coule en moi, elle coule dans mes veines.
J'ai l'impression qu'elle a toujours fait partie de moi.
Elle exprime des choses que je ressens profondément en moi.
Elle prend des chemins qui ne me sont pas inconnus.
Elle me fait vibrer, elle résonne en moi comme une harmonie familière, une harmonie qui me fait du bien mais qui me fait aussi mal.
Chopin me fait mal et me ravit.
Chopin me souffle des choses tristes et des choses ravissantes.
Des choses qui me bouleversent.
Schumann m'exalte et me blesse.
Schumann m'emporte.
Schubert me fait valser, très tristement.
Comme c'est triste, Schubert.
Brahms fait souffler un vent du Nord, qui chante et qui soupire.
Brahms est la blessure et la consolation.
Il dit adieu doucement, à l'enfance et à la jeunesse.
Brahms est tous les automnes.
Dvorák s'envole et carillonne.
Dvorák cache ses plaies derrière des sourires.
Des sourires tristes et graves.
Tchaïkovsky me fait mal et m'exalte.
Il meurt dans la souffrance et part sur un traîneau qui glisse légèrement, si légèrement.
Les fanfares font croire à la victoire.
Mais Tchaïkovsky a déjà tout perdu.
Il me rend songeur, éperdu de douleur.
Mendelssohn est si léger, si léger, on croit que les fées lui susurrent des mots tendres.
Mais elles lui soufflent que la mort est si près de lui.
Mendelssohn est sublime, et inconsolable.
Berlioz est si divinement fou, si divinement déraisonnable...
Berlioz est celui qui écrit la musique impossible.
La musique impossible et sublime.
Liszt brille, éclate, caracole!
Mais Liszt aussi chante doucement, pleure et s'alanguit.
Liszt, cette superbe défaite.
Revenons à Chopin, qui est le premier et le dernier.
Chopin qui m'a embrassé un jour où je pleurais.
Chopin qui m'a saisi, qui m'a fait danser avec des ombres.
Rachmaninov aussi m'emporte, il m'emmène où je me sens bien.
Rachmaninov sanglote dans un coin d'ombre, puis déchire le rideau et s'envole jusqu'aux lustres étincelants.
Rachmaninov enfle pendant de longues minutes, puis éclate en sanglots.
La musique romantique m'a donné rendez-vous, en cette vie.
Je lui ai tout donné.
Elle aussi m'a tout donné.
Je voudrais qu'elle soit la consolation et la bénédiction de ce monde.
L'horreur a encore frappé, les hommes se déchirent.
Dans ce monde de larmes, il reste si peu d'amour.
Si peu de consolation.
La terreur a encore frappé, les hommes pleurent.
Le deuil est silencieux comme la pluie.
Mon Dieu! Pourquoi faut-il que la Terre s'égare?
J'avais voulu oublier la violence, l'espace d'une sonate.
J'avais voulu croire au bonheur, le temps d'une valse.
Mais voilà que la mort aveugle revient frapper!
Et je suis au désespoir.
S'il était une ode qui console, un refrain qui redonne du courage, alors je voudrais qu'ils couvrent les cris et les pleurs.
Je voudrais qu'ils gagnent la bataille, que la musique soit reine.
Mais hélas, le soir tombe.
Des hommes et des femmes gisent dans le sang.
La musique pleure en silence.
Jérémie, le 17 août 2017
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